La Pinacothèque de Paris présente à l’occasion du cinquantième anniversaire de la disparition de Georges Rouault (1871-1958) les chefs-d’oeuvre de la collection japonaise Idemitsu pour la première fois en France depuis la Seconde Guerre mondiale. Du 17 septembre 2008 au 18 janvier 2009
Cette collection – une des plus réputée au monde – comprend plus de 400 oeuvres de Rouault dont une sélection de 70 oeuvres qui sera exposée pour la toute première fois à Paris. Seront proposées les thématiques récurrentes du peintre : nus, cirque, Christ, Pierrot, portraits ; oeuvres aux techniques variées : aquarelle, pastel, fusain, gouache, encres et huile allant de 1897 à 1956.
« Georges Rouault est un artiste majeur du 20ème siècle ; il était fondamental pour la Pinacothèque de Paris de lui rendre hommage et de faire découvrir ses chefs-d’oeuvre au public français », souligne Marc Restellini, directeur de la Pinacothèque et commissaire de l’exposition.
Georges Rouault occupe une place singulière parmi les artistes du XXe siècle, il a su développer un art très personnel fondé sur sa vision particulière et spirituelle du monde.
Sa formation à l’école des Beaux-arts dans l’atelier de Gustave Moreau aux cotés de Matisse et Marquet lui dispense un enseignement libéral et novateur qui marquera Rouault dans son appréhension de l’art : cette liberté de ton fera de Rouault l’élève préféré de Moreau.
Au décès du maître (1898), Rouault très affecté change radicalement de style et sa peinture s’assombrit. Cette crise le conduira à trouver refuge dans la spiritualité (il effectue une retraite en 1901 à l’Abbaye bénédictine Saint Martin de Ligugé où Huysmans espérait fonder une communauté d’artistes catholiques).
Nommé conservateur du musée Gustave Moreau il a désormais une relative aisance financière. Il partage un atelier avec Marquet à Pigalle et amorce une nouvelle manière picturale plus expressive notamment dans l’étude des « Filles », il associe alors plusieurs techniques (gouache, aquarelle, encres de Chine et de couleur, pastel…).
Le bouleversement intérieur de cette période éprouvante se répercute dans son travail, il caricature avec force certains visages de clowns, de juges et de prostituées faisant naître des allégories de la misère, de l’indifférence et de la luxure. Il sonde l’homme au plus profond de son âme, le dépeint sans fard, sans aucune convention sociale dans la réalité la plus nue qui s’impose à son regard. Son oeuvre ne cherche pas à séduire mais à dénoncer ce qui l’entoure. Ces oeuvres choquent ses contemporains et de nombreuses lettres d’insulte en attestent. Cela l’affecte mais ne le détourne nullement des déformations brutales qu’il inflige à ses personnages avec un dessin incisif, des couleurs violentes et une touche épaisse.
Vers 1910 il commence à utiliser la peinture à l’huile qui lui offre un chromatisme encore plus riche. Peu à peu l’huile va remplacer l’utilisation des différentes techniques, (il s’adonne aussi intensivement à la céramique et à la gravure).
En 1917, Ambroise Vollard lui achète l’ensemble de son atelier. Débute alors une collaboration fructueuse axée sur plusieurs éditions de livres comportant les illustrations de Georges Rouault (Passion, Miserere, Les Fleurs du Mal…).
L’artiste aborde un art plus contenu dans les années 20 pour aboutir aux oeuvres paisibles et colorées des années 30 : une certaine harmonie spirituelle émane des paysages ou des nus avec un intérêt marqué pour l’arabesque. Georges Rouault bénéficie alors d’une reconnaissance internationale.
La dernière décennie de sa carrière voit l’explosion des couleurs et de la matière. Cette quête d’une matière picturale unique est sans doute ce qui caractérise le mieux la recherche de Georges Rouault.
« Autant me priver d’air, de lumière, de vin, de café, de pain blanc ou de rares précieuses amitiés que de m’enlever mon « clavier pictural » » Georges Rouault.