« Jeff Koons » – Versailles (78)

« Il me paroist qu’il y a quelque chose à changer, que les sujets sont trop sérieux et qu’il fait qu’il y ait de la jeunesse meslée dans ce que l’on fera. Vous m’aporterés des desseins quand vous viendrés ou du moins des pensées. Il faut de l’enfance respendue partout » – Louis XIV

Si le roi était encore de ce monde, il aurait sûrement été agréablement surpris du métissage effectué entre l’art classique et l’art contemporain, dans les pièces même du château de Versailles.

En effet, Jeff Koons, artiste américain figurant parmi les plus côtés mais aussi les plus controversés du moment, a pris pleinement possession  du monument historique ainsi que de ses jardins, pendant quelques mois. Ce plasticien s’inspire grandement du pop art, du dadaïsme et du surréalisme amenant, à la façon de Duchamp, à la création d’objets et d’installations totalement kitsh tant par la matière que par le lieu d’exposition.

Cette grande manifestation artistique fut décriée par des associations et par le prince Charles-Emmanuel de Bourbon-Parme, descendant direct du roi, choqué par des œuvres qu’ils considèrent comme « pornographiques » et « mercantiles ».

Le tribunal administratif de Versailles a rendu raison au château de Versailles et permit même la prolongation de l’exposition, ce qui fut excellent puisque celle-ci accueillit 960 000 visiteurs.

En se réappropriant des objets de la vie quotidienne, Jeff Koons interroge la notion de bon goût et d’art en exposant ses dix sept sculptures pour sa première rétrospective française.

Il est difficile, même pour ses détracteurs, d’ignorer la médiatisation effectuée dans cette ville, les touristes n’étant même pas surpris, à la vue des deux sculptures gigantesques que l’on retrouvaient dans les jardins : Split Rocker, monumentale animal bicéphale, recouverte de multitudes de fleurs et Balloon flower, composante botanique en acier inoxydable.

La visite se poursuivit à l’intérieur même du château où la confrontation entre les deux mondes était subjuguante. Dans le salon d’Hercule trônait Balloon dog, sculpture enfantine en acier inoxydable ou bien encore Michael Jackson and bubbles, sculpture en porcelaine du musicien dans le salon de Vénus. Les visiteurs ne savaient pas s’ils devaient sourire ou grimacer. Mais cela n’empêchaient pas les enfants ni les personnes âgées de répondre présents.

Lobster est une sculpture en aluminium polychrome installée dans le salon de Mars, elle faisait face au propre lustre du château et se fondait dans la tapisserie vermillon.

Mais devant ses créations qui pouvaient paraître naïves voir sans réflexion profonde, il faut remettre les choses à leur place. Jeff Koons s’exprime originalement et rend compte des faits à travers un art provocateur et imaginaire. Cependant, ses œuvres sont toujours criantes de vérités comme en témoigne Bear and policeman, sculpture en bois polychrome, qui invitait le spectateur à appréhender son passé, son histoire sans se laisser intimider par « l’art noble », évoquant même l’abus de pouvoir sur le premier individu venu.

Dans l’antichambre du grand couvert, New hover convertibles…semblait convier à la réflexion, ces objets détournés de leur fonction, soulignant leur sentiment de pureté et de virginité en les enfermant tels des objets inertes. Interrogations sur l’immortalité et la nouveauté.

Mais sans conteste l’installation la plus impressionnante se trouvait dans la galerie des glaces : Moon (Light Blue). Placée dans cet univers, l’œuvre semblait devenir le reflet, le miroir de la société contemporaine, elle nous renvoyait notre image, liée à notre expérience, notre culture, monumentalisant et immortalisant le tout.

L’exposition Jeff Koons, en ce lieu et en cette période, fut révélatrice d’un nouvel état, d’un besoin de renouveau. Artistiquement, l’homme est en mesure de dépasser et d’appréhender à nouveau le monde différemment. Il pousse, au-delà de la futilité émise par ces formes enfantines, que critiqueront certains d’ailleurs, à analyser et étudier la société à travers l’Art.

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