1945-1949, Repartir à zéro,comme si la peinture n’avait jamais existé

Cette grande exposition sera consacrée à l’art de l’après seconde guerre mondiale, en Europe et en Amérique du nord. La période retenue est celle de l’immédiat après-guerre, qui va de 1945 jusqu’à la guerre froide (1945-1950). Au Musée des Beaux Arts de Lyon du 24 octobre 2008 au 2 février 2009.

Ce qui rassemble les artistes d’un monde occidental provisoirement réuni, pendant ce bref moment, est le sentiment de devoir repartir à zéro, de refonder un art débarrassé des idéologies qui avaient accompagné la création artistique depuis le début du XXe siècle.

La destruction de régions entières, la mort de dizaines de millions d’êtres humains, la découverte des camps de concentration nazis remplis de cadavres – morts ou vivants, l’explosion de deux bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki.
Les expériences traumatiques constituent, au sortir de la seconde guerre mondiale, le point de départ à partir duquel nombre d’artistes, de part et d’autre de l’Atlantique quoique avec des accents différents, envisagent désormais la création. Ils en
tirent la conclusion qu’il ne saurait y avoir d’autre méthode désormais que de « repartir à zéro, de faire comme si l’art n’avait jamais existé », pour reprendre la formule explicite du peintre américain Barnett Newman.

Pendant quelques années, entre 1945 et 1950, jusqu’à ce que triomphe la guerre froide et qu’apparaissent à nouveau des divisions infranchissables au sein du monde de l’art comme dans le reste de la société, une situation d’ouverture et de générosité a été créée par ces sentiments mêlés d’urgence et de perdition, de possible renouveau radical et de perte brutale du passé. Hommes et femmes ont échangé idées, oeuvres, et méthodes dans un paysage artistique à la fois libre et très diversifié. C’est ainsi que, en Amérique comme en Europe, se sont multipliées les pratiques expérimentales marquées par le primitivisme et l’automatisme, en particulier en peinture mais aussi en sculpture ou en photographie.

L’histoire de l’art a rapidement choisi de considérer cette période comme une parenthèse, un moment de formation quelque peu naïf avant que les artistes qui ont émergé atteignent leur pleine maturité. En même temps, elle a aussi figé la situation en deux blocs  opposés.
D’un côté, l’expressionnisme abstrait américain (avec Jackson Pollock, Mark Rothko, Clyfford Still, David Smith ou Willem De Kooning), marqué par une rupture brutale avec le passé de l’art et l’invention d’un nouveau sujet héroïque: l’idéal du pionnier de Western transposé dans les beaux-arts.
De l’autre côté, les abstraits lyriques (Nicolas de Staël, Wols, Bram van Velde, Pierre Soulages) d’une École de Paris acharnée à retrouver la gloire de la capitale artistique cosmopolite de la première moitié du vingtième siècle, en proposant une synthèse entre expérimentations abstraites et tradition tempérée.

L’exposition entend opérer une mise à plat de la situation artistique qui a prévalu pendant cette brève période où, souvent sans aucune concertation ni connaissance réciproque, des artistes ont voulu repartir à zéro.
Elle permettra notamment de dépasser le face-à-face Paris / New-York, en montrant comment le foisonnement de la création dans ces villes allait au-delà des deux ou trois figures qu’on en retient généralement, mais aussi en mettant en valeur une géographie plus complexe, qui intègre aussi bien le reste du vieux continent (Antoni Tapiès à Barcelone, Carl Buchheister à Hanovre, Lucio Fontana à Milan, les post-surréalistes tchèques,  polonais ou néerlandais) que la Côte Ouest des Etats-Unis (notamment les jeunes expérimentaux de San Francisco, comme Frank Lobdell ou Sam Francis), voire le Canada (avec le groupe des Automatistes, autour de Jean-Paul Riopelle).
Elle permettra ainsi de donner leur juste place à des figures souvent oubliées aussi bien qu’à quelques personnalités reconnues, dont elle montrera des ensembles monographiques exceptionnels.

Cette période, il faut le souligner, est un moment décisif dans la carrière de quelques-uns des plus grands artistes du XXe siècle – Pollock, Newman, Rothko, Soulages, Fontana – qui créèrent alors certains de leurs chefs-d’oeuvre, dont beaucoup seront rassemblés ici pour la première fois.

Commissariat de l’exposition

Eric de Chassey, professeur à l’Université François- Rabelais de Tours, membre de l’Institut universitaire de France.
Sylvie Ramond, conservateur en chef du patrimoine, directeur du Musée des Beaux- Arts.

Cette exposition est reconnue d’intérêt national par le Ministère de la culture et de la communication / Direction des musées de France. Elle bénéficie à ce titre d’un soutien financier exceptionnel de l’Etat.

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