Management et improvisation

Alain Asquin est Maître de Conférences en Sciences de Gestion, spécialisé en management stratégique et management par projet. Il animera le 26 février prochain une conférence intitulée « Ce que les arts de l’improvisation ont à apprendre au management ».

Pouvez-vous vous présenter aux lecteurs de Lartino ?

Je dirige un programme de master Entrepreneuriat et Management des Petites et Moyennes Organisations, nous formons des participants de formation initiale et continue à la conduite de projet de création ou de développement d’activité, qu’ils soient porteurs ou accompagnateurs de ces projets.
Nous avons des projets dans des domaines très différents, y compris dans le secteur non marchand. Nous avons déjà accompagné des projets dans le domaine culturel, au sens large du terme, par exemple un projet de label musical, un réseau de pubs ayant vocation de brasser les populations, un magazine culturel ou même une entreprise de vitraux.

Qu’est-ce que l’Institut d’Administration des Entreprises (IAE) et à quels métiers forme-t-il ses étudiants ?

Un IAE est une composante de l’Université qui fonctionne plutôt comme une école. Nous formons ici à Lyon à de nombreux métiers du management et de la gestion.
Il y a des IAE un peu partout sur le territoire, mais nous sommes spécifiques car nous avons un nombre important d’étudiants (5500) et que nous formons depuis la 1ère année jusqu’au doctorat.

Vous animez prochainement une conférence qui rapproche les thèmes d’improvisation et de management. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur celle-ci ?

La littérature, avec l’écriture automatique, la Danse-contact, la peinture de Kandinsky, le théâtre de la Commedia dell’ Arte et des ligues d’improvisation, la musique, et notamment le Jazz… chacun des arts majeurs est questionné par la création spontanée, par des improvisations qui acceptent le défi d’une œuvre composée et jouée en même temps. Au-delà de la seule spontanéité, la création par l’improvisation mobilise une technique aboutie, un état de perception mais aussi une ouverture au hasard.

Voilà des qualités enviables pour nos organisations constamment confrontées à des perturbations. Mais comment imaginer des structures organisationnelles qui codifient et en même temps habilitent les acteurs à composer avec l’inattendu ? Peut-on aider les collaborateurs à accepter le désordre comme nécessaire à l’émergence de leur créativité ? Comment articuler l’action individuelle improvisée dans un collectif ? Le management peut-il accepter ces initiatives qui échappent à son scénario ?

Nous proposons de traiter ces sujets concrètement avec des artistes qui nous feront partager leur art et avec des chercheurs en management qui situeront l’improvisation comme une pratique performante dans les organisations.

Quel est l’objectif principal de cette conférence ?

Réfléchir sur de nouvelles pratiques de management, de manière originale mais sérieuse.
Nous avons une vision réductrice de ce qu’il est possible de faire au sein de l’entreprise. Cette dernière est toujours vue comme un mécanisme et une machine alors qu’elle est un biotope complexe, une structure humaine et donc sociale.
Nous vivons une crise, c’est dit-on une crise d’un paradigme …et bien commençons le débat.

Est-elle ouverte à tout le monde ?

Oui, c’est bien notre mission que rendre ces conférences les plus ouvertes possibles.
Mais je ne vous cache pas que nous sommes en ce moment victime de notre succès. Il faut vite s’inscrire.

On peut trouver une part d’improvisation dans le management, mais n’est-ce pas un peu risqué ?

Evidemment que c’est risqué. Les organisations ont naturellement tendance à réduire le risque, c’est dans leur nature.
Cependant en situation de perturbation ou tout simplement quand il faut innover, il faut légitimer le risque.
Beaucoup de vos lecteurs savent que la création nait d’une certaine contrainte, mais dosée, ett qu’elle implique une mise en danger. A ne rechercher que l’ordre parfait, on rend les structures cristallines, inertes.
Entre le gazeux et le cristallin, il y a le liquide. C’est cet état que devraient chercher les organisations, une organisation fluide qui tolère une certaine forme de désordre qui est la source du mouvement.
Mais encore faut-il être clair sur les finalités qui président à la destinée de l’entreprise.

Et quel est l’avantage principal pour une organisation qui formerait son personnel à composer avec l’inattendu ?

Composer avec l’inattendu nécessite d’être créatif. Ce qui fait grandir chacun de nous. En même temps, cela impose de penser la cohérence avec le collectif. C’est la loyauté. Avoir des collaborateurs créatifs et loyaux, c’est un bel avantage.

Participerez-vous prochainement à d’autres conférences ?

Certainement, elles sont en cours de discussion. Nous en reparlerons peut être…

Un petit mot pour conclure ?

Je souhaite que nous soyons à l’avenir capables de reconnaître les compétences humaines dans leur globalité.
Ainsi, il faut absolument que nous réhabilitions dans nos formations puis dans les entreprises, la mobilisation des compétences artistiques. Il faut amener nos étudiants à penser l’esthétique de leur métier.

Alain Asquin, La Rédaction de Lartino vous remercie pour le temps précieux que vous avez accepté de nous consacrer.

Post author

Laisser une réponse